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Journée d’études

27032007

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Justice divine, institutions humaines :
permanence du théologico-politique

Date : Jeudi 12 avril 2007 

Lieu : Espace Culture – USTL (Lille 1) 

Problématique :  La loi, qu’elle soit révélée ou instituée, se donne toujours, même en démocratie, avec une dimension d’extériorité. Elle me concerne, j’en suis, en tant que citoyen, l’auteur, mais j’en suis aussi le sujet : j’obéis à la loi. Mais ce que signifie être sujet de la loi n’a pas le même sens dans la modernité depuis les Lumières du XVIIIème siècle que dans les Lumières médiévales (XIIème-XIIIème siècles). Différences tout à fait contemporaines : nous aurions tort de croire que le politique s’est une fois pour toutes affranchi du théologique. En effet : 1) les tentations théocratiques travaillent les sociétés orientales 

2) pour autant, les sociétés occidentales ne sont pas épargnées. Dans la pensée juridique et politique du XXème siècle ont émergé des problématiques du type « théologie politique » (Carl Schmitt).
Faut-il parler, avec Claude Lefort, d’une « permanence du théologico-politique » ? De vieilles représentations théocratiques ne travaillent-elles pas en sous-main les institutions les plus justes ? Il ne s’agit pas de rendre à César et à Dieu ce qui les concerne respectivement. Il s’agit d’éclairer le défi que nous posent des courants qui s’autorisent d’une justice transcendante et eschatologique pour disqualifier et rompre avec la justice rendue dans des institutions laïques. 

Comment s’articulaient, dans les sociétés antiques puis médiévales, le Tribunal céleste et la loi civile ? Quel était le pouvoir des Docteurs de la Loi (Judaïsme, Islam) ? Pour répondre à ces questions, il faut faire appel à des sources précises, documentées, d’un accès pas toujours aisé. Mais, il faut aussi montrer que ces questions ne visent pas seulement à satisfaire notre goût de l’érudition. Il y va aussi de nos comportements de citoyens ou d’éducateurs face aux menaces liées à la crise de civilisation que nous traversons. 

Jean-François Rey,
Philosophe 

Programme 

8h30 – Accueil des participants 

9h15 – Ouverture de la journée 

Nabil El-Haggar, Vice-président de l’USTL, chargé de la Culture et de la Communication et Jean-François Rey, Philosophe. 

 9h30/12h30 – Conférences 

1- Le théologico-politique à l’âge des réformes 

Bernard Cesla-Bourdin, Professeur d’histoire du christianisme à l’Institut Catholique de Lille, chargé d’enseignement en philosophie politique à l’Institut Catholique de Paris. 

Jacques VI d’Ecosse, Ier d’Angleterre, est le défenseur résolu d’une doctrine du droit divin des rois. Cette doctrine implique en outre une conception légitimiste-héréditaire du pouvoir royal. Dès lors est mise en cause l’interprétation cléricale de la doctrine presbytérienne des deux règnes et, du côté catholique-romain, la médiation pontificale comme instance régulatrice qui légitime les pouvoirs séculiers. Cette problématique nous place au cœur de la problématique théologico-politique de l’âge des Réformes. 

2- Spinoza et les instruments de la révélation 

Pierre-François Moreau, Professeur des Universités à l’École Normale Supérieure des Lettres et Sciences Humaines de Lyon. 

À l’âge classique (du XVIème au XVIIIème siècle) se sont mis en place la plupart des thèmes sur lesquels nous vivons encore aujourd’hui quand il s’agit du théologico-politique. Le schisme entre chrétiens, la meilleure connaissance des autres religions, la découverte d’autres cultures ont ébranlé un certain nombre de certitudes et conduit à repenser les traditions issues de la lecture de la Bible. Les deux questions essentielles ont été alors : 

- comment déterminer les frontières entre ce qui relève du religieux et ce qui relève du droit et de l’Etat ? et, à l’intérieur du domaine religieux, entre l’intervention divine (la révélation) et l’interprétation humaine ? 

- quels sont les instruments par lesquels Dieu fait connaître aux hommes sa volonté, sa justice et sa providence ? Théologiens, philosophes et historiens ont réfléchi sur ces questions : le signe, la prophétie, le miracle, la loi divine, l’Ecriture sainte. 

On peut se demander ce qui, dans cet ensemble complexe, est marqué par une époque historique, ce qui se transmet de cette époque à la nôtre, et ce qui relève d’un socle anthropologique plus durable. 

3- Le théologico-politique chez Hegel 

Jean-Louis Vieillard-Baron, Professeur à l’Université de Poitiers, directeur du Centre de Recherche sur Hegel et l’Idéalisme Allemand. 

Le § 360 et dernier des Principes de la philosophie du Droit montre que l’État hégélien est la volonté divine ; mais c’est à la condition d’être un État laïque, mondain, un État dans lequel la religion ne joue aucun rôle politique. Cet État est la réconciliation effective de la cité des hommes et de la cité de Dieu. Il suppose que la vérité ait abandonné sa violence, qui n’est pas seulement celle du dogmatisme ni celle du fanatisme, religieux ou politique, mais celle de la vérité même, la violence liée à la puissance de l’Idée, qui doit devenir pouvoir politique organisé au sein de l’État. C’est seulement dans l’Idée de l’État que la vérité a abandonné sa violence contingente (historique) mais aussi sa violence nécessaire (idéelle) grâce à l’organisation des pouvoirs. La réconciliation véritable suppose le dépassement de la négation religieuse du politique (l’État théocratique) et la négation politique de la religion (la société politique sans Dieu ni religions). Pour cela, l’État doit accomplir la Sittlichkeit et la spiritualité religieuse doit s’épanouir dans l’État. État et religion sont alors pour eux-mêmes des garanties mutuelles (Encyclopédie de 1830, § 552 R). 

  

14h30/18h00 – Table ronde  

1- La loi dans la turbulence 

Introduction par Jean-François Rey

2- La cité vertueuse d’Alfarabi (870-950) 

Avec Jean-Marie Breuvart, Philosophe. 

Dans ce livre, Alfarabi, philosophe de la fin du 1er millénaire chrétien, a voulu montrer, sur la base des grands écrits politiques de Platon et d’Aristote, comment la pensée politique de ces deux auteurs pouvait s’appliquer à l’Islam. Ce travail se fit à l’intersection entre plusieurs disciplines, notamment la philosophie, la jurisprudence et la théologie.
Cette application de la philosophie grecque à la compréhension des rapports que la nouvelle religion révélée entretenait avec le politique a été réalisée de façon très ouverte, de telle sorte que les penseurs juifs ou chrétiens se sont inspirés de ses enseignements dans leur propre réflexion sur l’articulation entre philosophie et transcendance. 

3- Regard d’un orthodoxe sur le théologico-politique 

Bertrand Vergely, Professeur de philosophie à Orléans et à l’Institut d’Études Politiques de Paris. 

Si égalité, mérite et punition sont nécessaires pour structurer la vie sociale, leur relation n’est pas suffisante pour la fonder. Une telle carence ne vient-elle pas de ce que la justice perd son sens, quand elle n’est plus ce qui règle la vie humaine en lui permettant de se verticaliser afin d’aller à la rencontre de sa droiture ? On fait naître la justice à l’extérieur de soi, quand on fait naître le juste à l’intérieur de soi. Cette pratique du juste en l’homme donne au discours théologique sur la justice une pertinence aussi féconde qu’inattendue. 

4- Une théologie politique chrétienne est-elle légitime ? 

Bernard Cesla Bourdin, Professeur d’histoire du christianisme à l’Institut Catholique de Lille, chargé d’enseignement en philosophie politique à l’Institut Catholique de Paris. 

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, l’Allemagne traverse une grave crise religieuse et politique. Sur le plan religieux, cette crise est particulièrement manifeste dans l’Eglise protestante. C’est dans ce contexte que le théologien Eric Peterson développe, après sa conversion au catholicisme et l’arrivée au pouvoir des nazis, la thèse selon laquelle il ne saurait y avoir de justification à une théologie politique chrétienne. Cette thèse, qui s’oppose à celle du juriste Carl Schmitt, sera l’objet d’une nouvelle controverse en 1969 après la publication de la deuxième conférence de théologie politique de Schmitt. 

5- Du théologico-politique au service de l’exceptionnalité 

Gabriel Peries, Enseignant à l’Institut National des Télécommunications, Evry et chercheur à l’Institut d’Études Politiques de Toulouse. 

L’objet de cette communication est de signaler, eu égard à la théorie
juridique de l’exceptionnalité, les principales caractéristiques structurelles de la normativité issue du domaine théologico-politique schmittien. La discussion démontrera que penser avec Giorgio Agamben que l’exceptionnalité est un lieu normativement vide empêche d’aborder la question de l’organisation de la violence politique et de sa prétention à la souveraineté. 

18h30 – Cocktail 

Inscription : 

Pour y participer, il faut s’inscrire sur le lien suivant:

http://ustl1.univ-lille1.fr/culture/agenda/07/conf/justice/inscription.html 




Manifeste Russell-Einstein

27032007

publié à Londres le 9 Juillet 1955

« Dans la situation dramatique où se trouve l’humanité, nous estimons que les hommes de science devraient se réunir en conférence pour prendre la mesure des périls créés par le développement d’armes de destruction massive et examiner un projet de résolution dont l’esprit serait celui du projet ci-dessous.

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Ce n’est pas au nom d’une nation, d’un continent ou d’une foi en particulier que nous prenons aujourd’hui la parole, mais en tant qu’êtres humains, en tant que représentants de l’espèce humaine dont la survie est menacée. Les conflits abondent partout dans le monde…

Chacun d’entre nous, ou presque, pour peu qu’il soit politiquement conscient, a des opinions bien arrêtées sur l’une ou plusieurs des questions qui agitent le monde; nous vous demandons toutefois de faire si possible abstraction de vos sentiments et de vous considérer exclusivement comme les membres d’une espèce biologique qui a derrière elle une histoire exceptionnelle et dont aucun d’entre nous ne peut souhaiter la disparition.

Nous nous efforcerons de ne rien dire qui puisse constituer un appel à un groupe plutôt qu’à l’autre. Tous les hommes sont également en danger, et peut-être, s’ils en prennent conscience, parviendront-ils à s’y soustraire collectivement.

Il nous faut apprendre à penser d’une façon nouvelle. Il nous faut apprendre à nous demander non pas de quelle façon assurer la victoire militaire du groupe auquel vont nos préférences, car cela n’est plus possible, mais comment empêcher un affrontement militaire dont l’issue ne peut qu’être désastreuse pour tous les protagonistes.

Le grand public, et beaucoup parmi ceux qui exercent le pouvoir, n’ont pas pleinement saisi ce qu’impliquerait une guerre nucléaire. Le grand public raisonne encore en termes de villes anéanties. Il sait que les nouvelles bombes sont plus puissantes que les anciennes, et que si une bombe A a suffi à rayer Hiroshima de la carte, une seule bombe H pourrait en effacer les principales métropoles : Londres, New York ou Moscou. 

Il est certain que dans une guerre au cours de laquelle la bombe H serait utilisée, les grandes villes disparaîtraient de la surface de la terre. Mais ce n’est là qu’un des moindres désastres que subirait l’humanité. Même si la population entière de Londres, New York et Moscou était exterminée, l’univers pourrait, en quelques siècles, reprendre le dessus. Mais nous savons désormais, en particulier depuis l’essai de Bikini, que l’effet destructeur des bombes nucléaires peut s’étendre à une zone beaucoup plus vaste qu’on ne l’avait cru au départ.

On sait de source autorisée qu’il est désormais possible de fabriquer une bombe 2500 fois plus puissante que celle qui détruisit Hiroshima. Une telle bombe, explosant près du sol ou sous l’eau, projette des particules radio-actives jusque dans les couches supérieures de l’atmosphère. Ces particules retombent lentement sur la surface de la Terre sous forme de poussière ou de pluie mortelles. C’est cette poussière qui a contaminé les pêcheurs japonais et leurs prises.

Nul ne sait jusqu’où s’étendrait ce nuage mortel de particules radio-actives, mais les personnalités les plus autorisées sont unanimes à dire qu’une guerre au cours de laquelle seraient utilisées des bombes H pourrait fort bien marquer la fin de la race humaine. Ce que l’on redoute, c’est, si plusieurs bombes H sont utilisées, que tous les hommes trouvent la mort, mort soudaine pour une minorité seulement, mais la lente torture de la maladie et de la désintégration pour la majorité.

Les avertissements n’ont pas manqué de la part des plus grands savants et spécialistes de la stratégie militaire. Aucun d’entre eux ne va jusqu’à affirmer que le pire est certain. Ce qu’ils affirment, c’est que le pire est possible et que nul ne peut dire qu’il ne se produira pas. Nous n’avons jamais constaté que l’opinion des experts sur ce point dépende en aucune façon de leurs opinions politiques ou de leurs préjugés. Elle ne dépend, pour autant que nos recherches nous permettent de l’affirmer, que de ce que chaque expert sait. Ce que nous avons constaté, c’est que ceux qui en savent le plus sont les plus pessimistes.

Tel est donc, dans sa terrifiante simplicité, l’implacable dilemme que nous vous soumettons : allons-nous mettre fin à la race humaine, ou l’humanité renoncera-t-elle à la guerre? Si les hommes se refusent à envisager cette alternative, c’est qu’il est fort difficile d’abolir la guerre.

L’abolition de la guerre exigera des limitations déplaisantes de la souveraineté nationale. Mais ce qui plus que tout empêche peut-être une véritable prise de conscience de la situation, c’est que le terme « humanité » est ressenti comme quelque chose de vague et d’abstrait. Les gens ont du mal à s’imaginer que c’est eux-mêmes, leurs enfants et petits-enfants qui sont en danger, et non pas seulement une humanité confusément perçue. Ils ont du mal à appréhender qu’eux-mêmes et ceux qu’ils aiment sont en danger immédiat de mourir au terme d’une longue agonie. Et c’est pourquoi ils espèrent que la guerre pourra éventuellement continuer d’exister, pourvu que l’on interdise les armements modernes.

C’est là un espoir illusoire. Quels que soient les accords sur la non-utilisation de la bombe H qui auraient été conclu en temps de paix, ils ne seraient plus considérés comme contraignants en temps de guerre, et les deux protagonistes s’empresseraient de fabriquer des bombes H dès le début des hostilités; en effet, si l’un d’eux était seul à fabriquer des bombes et que l’autre s’en abstenait, la victoire irait nécessairement au premier.

Un accord par lequel les parties renonceraient aux armes nucléaires dans le cadre d’une réduction générale des armements ne résoudrait pas le problème, mais il n’en serait pas moins d’une grande utilité. En premier lieu, en effet, tout accord entre l’Est et l’Ouest est bénéfique dans la mesure où il concourt à la détente. En deuxième lieu, la suppression des armes thermonucléaires, dans la mesure où chacun des protagonistes serait convaincu de la bonne foi de l’autre, diminuerait la crainte d’une attaque soudaine dans le style de celle de Pearl Harbour, crainte qui maintient actuellement les deux protagonistes dans un état de constante appréhension nerveuse. Un tel accord doit donc être considéré comme souhaitable, bien qu’il ne représente qu’un premier pas.

Nous ne sommes pas pour la plupart neutres dans nos convictions, mais en tant qu’êtres humains, nous devons nous rappeler que, pour être réglées à la satisfaction de qui que ce soit, communistes ou anti-communistes, Asiatiques, Européens ou Américains, Blancs ou Noirs, les difficultés entre l’Est et l’Ouest ne doivent pas l’être par la guerre. Nous devons souhaiter que cela soit compris, tant à l’Est qu’à l’Ouest.

Il dépend de nous de progresser sans cesse sur la voie du bonheur, du savoir et de la sagesse. Allons-nous, au contraire, choisir la mort parce que nous sommes incapables d’oublier nos querelles? L’appel que nous lançons est celui d’êtres humains à d’autres êtres humains : rappelez-vous que vous êtes de la race des hommes et oubliez le reste. Si vous y parvenez, un nouveau paradis est ouvert; sinon, vous risquez l’anéantissement universel.

Résolution

Nous invitons le présent congrès et, par son intermédiaire, les hommes de science du monde entier et le grand public, à souscrire à la résolution suivante :

Compte tenu du fait qu’au cours de toute nouvelle guerre mondiale les armes nucléaires seront certainement employées et que ces armes mettent en péril la survie de l’humanité, nous invitons instamment les gouvernements du monde à comprendre et à admettre publiquement qu’ils ne sauraient atteindre leurs objectifs par une guerre mondiale et nous leur demandons instamment, en conséquence, de s’employer à régler par des moyens pacifiques tous leurs différends. »

Le 23 décembre 1954

Ce texte a été signé par :

Professeur Max Born (professeur de physique théorique à Berlin, Francfort et Göttingen, et professeur de philosophie de la nature à Édimbourg; Prix Nobel de physique)
Professeur P.W. Bridgman (professeur de physique, Harvard University; Prix Nobel de physique)
Professeur Albert Einstein
Professeur L. Infeld (professeur de physique théorique, Université de Varsovie)

Professeur J.F. Joliot-Curie (professeur de physique au Collège de France; Prix Nobel de chimie)
Professeur H.J. Muller (professeur de zoologie, University of Indiana; Prix Nobel de physiologie et de médecine)
Professeur Linus Pauling (professeur de chimie, California Institute of Technology; Prix Nobel de chimie) 

Professeur C.F. Powell (professeur de physique, Bristol University; Prix Nobel de physique)
Professeur J. Rotblat (professeur de physique, University of London; Medical College of St Bartholomew’s Hospital)
Bertrand Russell
Professeur Hideki Yukawa (professeur de physique théorique, Université de Kyoto; Prix Nobel de physique)







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