« La Torah des rois »
15 11 2009
Tsahal sous l’influence d’extrémistes religieux
Article de Serge DUMONT paru au journal Suisse LE TEMPS le jeudi 12 novembre 2009
Une «Torah des rois» rédigée par un rabbin explique qu’il est permis de tuer des non-juifs. Le livre a été distribué aux soldats participant à l’opération «Plomb durci» à Gaza.
La Torah des rois. A priori, ce livre de préceptes religieux rédigé par le rabbin Itzhak Shapira n’aurait pas dû intéresser grand monde en Israël. Pourtant, cet ouvrage relié cuir déchaîne la polémique. Et affole le Département «extrémistes juifs» du Shabak (la Sûreté générale de l’Etat hébreu). Car La Torah des rois s’adresse aux centaines d’élèves des «yeshivot» (écoles de talmudiques) de Cisjordanie auxquels elle explique qu’il est permis de tuer les «goyim» (non-juifs) sans remords. Et sans se poser de question. Cette autorisation s’étend aux bébés, aux innocents et même aux amis d’Israël.
Vendu 30 shekels (7 francs suisses), ce livre n’est pas un obscur opuscule diffusé sous le manteau. Il est, au contraire, recommandé comme ouvrage théologique par une série de rabbins des colonies de Cisjordanie qui l’ont inscrit au programme des «yeshivot».
A Ytzhar, l’implantation dont Itzhak Shapira est le ministre officiant, personne ne semble comprendre pourquoi La Torah des rois soulève la polémique en Israël et pourquoi le quotidien Maariv en a fait sa manchette en dénonçant le «droit divin de tuer» que s’arrogent les colons.
Un «ADN juif»
«Le «rav» [rabbin] se contente de résumer ce qui se trouve déjà dans la Bible, estime Daniel W., un étudiant de la «yeshiva». Ce livre confirme notre droit divin à éliminer nos ennemis [ndlr: les Palestiniens]. Il explique que nous pouvons agir seuls sans demander la permission de qui que ce soit.»
Les publications appelant à la violence au nom d’une prétendue «justice divine» se multiplient depuis le démantèlement des implantations de la bande de Gaza (août 2005). Elles confirment le développement d’un fondamentalisme juif dont l’épicentre se situe dans les colonies extrémistes de Cisjordanie. Un courant emmené par une soixantaine de rabbins parmi lesquels Dov Volpe (le ministre officiant de la colonie de Kyriat Arba) et Itzhak Ginsburg, un rabbin persuadé qu’il existerait un «ADN juif» supérieur à celui des «goyim».
Parmi les auteurs les plus prolixes du fondamentalisme juif figure le rabbin Shlomo Aviner dont les préceptes interdisant «de céder le moindre millimètre de notre terre aux non-juifs» ont été distribués aux soldats participant à l’opération «Plomb durci» (l’invasion de la bande de Gaza en janvier 2009). Cette brochure appelait ses lecteurs «à ne montrer aucune pitié» face à l’«ennemi cruel» palestinien et à provoquer le plus de destructions possible.
Certes, l’officier responsable de la distribution du pamphlet a été sanctionné, mais, durant l’été dernier, un nouvel ouvrage a fait son apparition dans les chambrées. Intitulé Des deux côtés de la frontière, ce livre rédigé par un rabbin de Safed avec l’aide d’une organisation ultraorthodoxe américaine prétend en substance que le Vatican financerait le Hezbollah afin de perpétrer un nouvel Holocauste.
A travers leurs «yeshivot», les rabbins fondamentalistes de Cisjordanie forment annuellement des centaines de candidats aux unités d’élite de Tsahal (l’armée) ainsi qu’aux carrières de sous-officiers et d’officiers. Selon les statistiques de l’armée, ils représenteraient 40 à 50% des candidats aux fonctions d’officiers et de sous-officiers alors que les colons constituent moins de 5% de la population israélienne.
«Cours de démocratie»
Le 23 octobre, profitant d’une cérémonie de prestation de serment devant le mur des Lamentations, des anciens de «yeshivot» affectés à l’unité spéciale «Shimshon» (des commandos antiterroristes opérant en Cisjordanie) ont manifesté publiquement leur désapprobation à propos de l’évacuation d’une colonie de Cisjordanie. Une première dans l’histoire de l’Etat hébreu. Certes la hiérarchie a sanctionné les quelques soldats qui avaient brandi le slogan «Homesh ne sera pas évacuée», mais le rabbin Dov Volpe et ses semblables leur ont accordé un prix «pour avoir donné un cours magistral de démocratie et de civisme».
Sadiahajib
Tu as tout dit. Permets-moi de publier ton commentaire sur mon blog. Merci.