OMAS : vecteur d’une médecine islamiste en France ?
20 12 2017Dans la nuit du 4 au 5 décembre 2017, dans le Neuf-trois, à Pavillons-sous-Bois (Seine Saint-Denis), une femme de confession musulmane, âgée de 47 ans et mère de 5 enfants, est tombée dans le coma[1]. A domicile, un homme et une femme ont exercé sur elle la fameuse «Roqia»[2] (رقية) doublée d’une «ventousothérapie» ou «Hijamah»[3] (حجامة) — deux rituels utilisés durant les séances de désenvoutement, considérés par les frérosalafistes comme faisant partie d’une prétendue «médecine prophétique» (الطب النبوي). Car le prophète, selon leur vision intégraliste de l’islam, aurait été aussi «médecin» en plus d’avoir été, à les croire, «roi», «chef des armées», et que sais-je d’autres. Ainsi, après avoir bu 20 litres d’eau bonifiée par des versets coraniques, cette mère de famille a plongé dans le coma.
Dans un article du Parisien, on apprend que «les prières ne produisant pas les effets escomptés en termes de réveil, le SAMU a fini par être appelé à la rescousse. Et c’est à l’hôpital de Montfermeil que la victime a été conduite»[4]. Un autre article du même Parisien, datant du 12 décembre, précise que la surabondance de l’eau bue a «occasionné un œdème cérébral». On apprend aussi que l’homme et la femme «praticiens», placés durant quelques heures en garde à vue, «ont été remis en liberté le soir même»[5]. Une enquête aurait été confiée à la sureté territoriale. La mère de famille serait toujours hospitalisée en semi-coma.
Dans un cas pareil, en Algérie, en août 2010, une femme de 55 ans, mère de 9 enfants, a perdu conscience avant de décéder entre les mains d’un religieux charlatan[6]. Toujours en Algérie, en mars 2015, c’est une étudiante de 20 ans qui a perdue la vie suite à une Roqia-Hijama[7] suivant le même «protocole» dit «prophétique». La mort était aussi le sort de la jeune Louisa, décédée à Roubaix (Nord) en 1997, entre les mains d’un imam exorciste[8]. Sans parler des cas avérés où l’imam prend plaisir à tripoter, sans gêne, le corps de celle qui vient chercher chez lui la baraka, le remède à son malaise psychologique. On peut multiplier les exemples dramatiques et scandaleux tellement les récits se suivent et se ressemblent. Parfois, cela se passe au sein même du lieu de culte.
Néanmoins, des questions demeurent : pourquoi cette pratique moyenâgeuse se développe-t-elle davantage, y compris en France? Y’aurait-il une corrélation entre son développement, d’un côté, et celui de l’islamisme et du frérosalafisme, de l’autre? Comment se fait-il que cette «médecine» dite «prophétique» est pratiquée sans que les autorités n’interviennent pour, au moins, la contrôler? Qu’en pense le Conseil National de l’Ordre des Médecins: car, au-delà de certains charlatans autoproclamés, des médecins islamistes la pratiquent? Qu’en pense le législateur? Comment est-il possible que le territoire national est désormais quadrillé par des centres de Roqia-Hijama, à tel point que dans chaque grande ville, il y a un ou des centres qui la proposent? Si on est de Roubaix, on peut se faire ventouser, au nom du prophète, ici[9]. Si on est de Paris, cela se passe, entre autres, ici[10]. Si on est de Lyon, c’est ici[11]. Si on est de Bordeaux, on peut se la payer ici[12]. Les nantais peuvent la pratiquer ici[13]. En Lorraine, cela se passe ici[14]. À Marseille, l’un des centres est ici[15], etc. La Sécurité Sociale la prend-t-elle en charge quand elle est pratiquée dans des cabinets de médecine générale ou par des spécialistes référencés?
Je n’ai pas de réponses à toutes ces questions qui méritent une investigation approfondie, conduite par une équipe pluridisciplinaire et déterminée. Cependant, ce que je peux dire, c’est que le développement, vraisemblablement croissant de cette pratique dans un certain nombre de territoires en France, est l’un des marqueurs identitaires (voile, halal, carrés musulmans, mosquées-cathédrales, circoncision, etc.) de cette rupture voulue par des acteurs islamistes acharnés. Ils l’imposent comme «médecine alternative», petit-à-petit, telle une balise sur un chemin de conquête de l’espace public, hospitalier en l’occurrence. Là où les islamistes se déploient, cette pratique — qui existait de façon très marginale depuis toujours dans certains pays arabes — devient très présente. Très populaire même : certainement pas pour ses «bienfaits» médicaux, mais parce qu’elle est présentée comme une sunna du prophète !
Le plus inquiétant, en France, c’est que cette pratique est loin d’être promue par des imams charlatans. En effet, une organisation frériste créés en 2015, nommée OMAS[16]-[17] (Organisation Musulmane des Acteurs de la Santé) ne ménage aucun effort pour la justifier, religieusement parlant, et pour la promouvoir, officiellement. Cette organisation, qui revendique 2500 adhérents sur tout le territoire national — médecins, pharmaciens, dentistes, infirmiers, sages-femmes, kinésithérapeutes, psychologues et d’autres professionnels de santé — lui trouve des mérites : des hadiths attribués au prophète. En effet, le 23 décembre 2015, l’OMAS a publié sur sa page Facebook officielle, un post intitulé: «Les mérites de la Hijama (cupping therapy)»[18]. On y apprend, je cite ce hadith d’al-Bukhâry: «Le Messager d’Allah a dit: «Pendant mon Voyage Nocturne, je ne suis pas passé devant un groupe [d’anges, ndlr] sans qu’ils ne me disent: «Ô Muhammad ! Ordonne à ta communauté de pratiquer Al-Hijâmah». Dans une autre version de ce même hadith, rappelle l’OMAS, je cite : «Attache toi à la pratique de Al-Hijâmah, ô Muhammad !» ou comment l’OMAS, telle une organisation frérosalafiste, se basant sur une littérature religieuse controversée, promeut ladite hijama auprès de son public.
Le 13 août 2016, la même organisation frériste OMAS, a publié cette fois-ci, un long texte avec une illustration intitulée «la hijama, une sunna à travers une thérapie prophétique». On y voit le bras d’une blouse blanche fixant une ventouse sur le dos d’un patient, avec ce rappel à côté: «le prophète disait: il n’y a pas un groupe d’anges que je n’ai rencontré, la nuit de l’ascension, qui ne met pas dit Oh Mouhammad, ordonne à ta communauté la hijama». Cela suffirait comme argument «médical» pour la promouvoir. Car dans bien des esprits, les fréristes de l’OMAS le savent, dès que l’on dit que le prophète a dit, l’information est admise comme vérité absolue, comme ordre, même si ladite «ascension du prophète» vers le ciel, à la suite d’un «voyage nocturne», n’est qu’une fable comme je l’ai expliqué dans mon article: «Jérusalem: du calife Omar au président Trump»[19].
Toutefois, l’OMAS n’est pas seule dans la promotion religieuse de cette pratique rituelle très risquée. Elle peut compter sur le concours d’un certain Nabil Ennasri, qui connait bien l’OMAS, à tel point qu’il en fait un cas de modèle prometteur (à suivre) dans son essai «Et maintenant, que fait-on? Parce que nous n’avons plus le temps». Il présenta l’OMAS en ces termes, je cite: «conçue comme un espace destiné à concilier l’exercice professionnel dans le milieu médical avec les valeurs de l’islam, l’association coache également les jeunes inscrits en première année de médecine pour améliorer le taux de réussite. Comptant plusieurs antennes réparties dans plusieurs facultés de France, elle regroupe plusieurs centaines d’adhérents dans diverses disciplines médicales, de l’étudiant débutant en première année au praticien spécialisé»[20]. L’OMAS rend hommage à Nabil Ennasri en ces termes: «Qu’Allah préserve et facilite nos jeunes qui se bougent pour Allah, la Oumma et l’Homme en général. Nous remercions Nabil Ennasri et tous les autres qui nous soutiennent, conseillent et incitent à nous élever et atteindre al-Ihsan [l’excellence, ndlr]»[21].
Au sujet de la promotion de ladite Hijama, Nabil Ennasri ne manque pas d’imagination, il propose sur l’un de ses sites à un certain Karim, présenté comme étant kinésithérapeute, une interview pour dérouler, entre autres, son argumentaire religieux, rappelant que cette pratique est d’abord une «recommandation prophétique»[22]. Enfin, Nabil demanda à Karim s’il a des «sites et des ouvrages de qualité à lui recommander». Et Karim de conseiller Nabil de consulter «le site du Dr Ait M’hammed Moloud»[23], un généraliste d’Amiens qui ne peut que choquer lorsque, sur un autre sujet relatif à ce qu’il appelle «l’isolement avec un individu de sexe opposé en cabinet de soin», conseille à ses frères et sœurs, je cite: «J’invite ainsi mes collègues, hommes et femmes, à fournir l’effort nécessaire au quotidien pour contrôler cet aléa professionnel, qui je le conçois est plus difficile à observer en terre de mécréance qu’en terre d’Islam mais tel est notre responsabilité et nous devrons en rendre compte»[24] avant de rappeler cette fatwa d’un salafiste saoudien, Souleyman Ar-Rouheyli[25] de son nom, qui dit: «Il n’est pas permis au médecin de s’isoler avec une patiente mais il incombe à cette dernière d’être accompagnée par son mahram ou, à défaut, par une autre femme afin de mettre fin à cet isolement, une infirmière par exemple. Toutefois, si cet isolement répond à une nécessité thérapeutique alors il est possible de recourir à une porte vitrée (ou fenêtrée) voire une baie vitrée, permettant de les voir sans pour autant les entendre»[26]. Inutile de rappeler à ces «médecins» les termes du Serment d’Hippocrate[27].
L’avis de ce cheikh salafiste a bel et bien été respecté dans le Neuf-trois, dans le cas de cette mère de famille de Pavillons-sous-Bois. La séance de sa Roqia-Hijama s’est déroulée dans le strict respect de la sunna. On peut s’en réjouir. Car elle n’est pas tombée dans le coma seule, face à un homme. Heureusement, une femme était avec elle: elle est belle la «médecine prophétique» puisqu’elle allie une certaine éthique avec une certaine pratique clandestine. Nabil y veille. L’OMAS aussi. Mais que fait l’État? Qu’en pensent nos médias? Pour que ça bouge, on ne va pas quand même lancer le hashtag #BalanceTonHajjâm ?
Notes :
[1]- http://www.leparisien.fr/…/pavillons-sous-bois-dans-le-coma…
[2]- Plus d’info sur ce site pro-roqia : http://ufcm.fr/dossier-roqya/quest-ce-que-la-roqya/
[3]- Plus d’info sur ce site pro-hijama : https://muslim-sante.com/…/la-hijama-une-therapeutique-rem…/
[4]- http://www.leparisien.fr/…/pavillons-sous-bois-dans-le-coma…
[5]- http://www.leparisien.fr/…/desenvoutement-aux-pavillons-sou…
[6]- https://www.djazairess.com/fr/setiffr/4640
[7]- http://www.huffpostmaghreb.com/…/bellahmar-arrete-deces-fe_…
[8]- http://www.liberation.fr/…/a-la-chasse-au-demon-l-imam-a-tu…
[9]- http://institut-tibnabawi.fr/
[10]- http://hijama-sunna-paris.com/
[11]- http://la-hijama.fr/hijama-lyon/
[12]- http://la-hijama.fr/hijama-bordeaux/
[13]- http://la-hijama.fr/hijama-nantes/
[14]- https://www.facebook.com/Hijama-Lorraine-471707992992562/
[15]- http://hijamacentermarseille.fr/
[16]- https://www.omas-france.com/
[17]- https://www.facebook.com/omasofficielle/
[18]- https://www.facebook.com/omasofficielle/photos/a.897745977011612.1073741836.791238037662407/897746820344861/?type=3&theater
[19]- http://mlouizi.unblog.fr/…/jerusalem-du-calife-omar-au-pre…/
[20]- https://www.facebook.com/omasofficielle/photos/a.847226568730220.1073741828.791238037662407/1008994632553412/?type=3&theater
[21]- Ibid.,
[22]- http://www.les7defis.com/…/pour-tout-connaitre-sur-la-hija…/
[23]- Ibid.,
[24]- https://muslim-sante.com/…/l-isolement-avec-un-individu-de…/
[25]- http://www.shalruhaily.com/
[26]- https://muslim-sante.com/…/l-isolement-avec-un-individu-de…/
[27]- https://www.conseil-national.medecin.fr/…/default/files/ser…
SCANDALEUX A NOTRE EPOQUE
HORS DE FRANCE
Bof…
L’OMAS ne s’est jamais revendiqué « frériste », c’est plus un groupe de soutien universitaire entre musulmans qu’autre chose, il n’y a jamais eu de revendication politico-religieuse à ma connaissance.
D’autre part ce qu’a dit le cheikh saoudien n’est pas compatible avec nos moeurs et la déontologie médicale française mais ne contredit pas en soi le serment d’hippocrate (l’avez vous réellement lu?)
Un problème plus général c’est que la critique des musulmans est très souvent teinté de mépris de haine et de théories du complot, un « antisémitisme » musulman en somme…
C’est dommage que la critique ne soit jamais constructive, permettant d’aller de l’avant. Bref